FMH: Moins de sécurité pour les patients et davantage de coûts
Bien que la Commission de la santé du Conseil national ait consacré de nombreuses séances à la révision de la loi sur les produits thérapeutiques, son projet de loi actuel ne convainc pas sur des points essentiels. Non seulement le projet compromet la sécurité des patients et la qualité des soins, mais il implique aussi une hausse considérable des coûts et, partant, des primes.
Désormais, les pharmaciens devraient pouvoir remettre des médicaments soumis à ordonnance également sans ordonnance préalable d’un médecin – et donc sans diagnostic (art. 24 LPTh). Une disposition qui compromet non seulement la sécurité des patients mais également la qualité des soins. Alors que la pose du diagnostic fait partie intégrante de la formation pré- et postgraduée des médecins qui s’étend sur de nombreuses années, les pharmaciens ne sont pas formés dans ce domaine.
Du reste, la loi sur les professions médicales (LPMéd), également en cours de révision, ne prévoit pas non plus de formation à ce sujet. De la même manière, la formation et l’expérience clinique en matière de prise en charge des patients, que les médecins acquièrent lors de leur formation postgraduée au chevet des patients et au cabinet, font défaut aux pharmaciens. C’est précisément pour cela que la Commission fédérale pour les vaccinations (CFV) s’est prononcée contre la vaccination en pharmacie.
Pour pouvoir gérer correctement un choc anaphylactique, le cours d’une journée proposé dans le cadre de la formation complémentaire des pharmaciens n’est pas suffisant. L’administration d’un vaccin requiert des compétences médicales que l’on ne peut pas acquérir en un jour et demi – même la formation de nos soldats sanitaires dure plus longtemps que le programme de formation complémentaire des pharmaciens. La modification proposée par la Commission de la santé du Conseil national (CSSS-N) compromet ainsi la sécurité des patients et doit donc être rejetée. Elle est en outre inutile, la loi autorisant aujourd’hui déjà les pharmaciens à remettre des médicaments soumis à ordonnance dans les cas d’urgence.
Obligation de délivrer une ordonnance: inutile et coûteuse (art. 26)
Avec l’art. 26 LPTh, la CSSS-N entend à l’avenir obliger aussi bien les médecins que les pharmaciens et les droguistes à délivrer une ordonnance avant toute remise de médicament, obligation qui concerne tant les médicaments soumis à ordonnance que ceux qui ne le sont pas. Les pharmaciens et les droguistes devraient ainsi établir une ordonnance chaque fois qu’ils remettent un médicament non soumis à ordonnance: une situation pour le moins absurde sachant que cette ordonnance ne sera plus jamais utilisée. Les médecins pratiquant la propharmacie devraient eux aussi établir une ordonnance même si le patient souhaite retirer ses médicaments directement auprès de son médecin.
En outre, la signature électronique qualifiée exigée ne permet en aucun cas d’améliorer la sécurité des médicaments. En effet, elle ne fait que confirmer l’identité du prescripteur sans vérifier qu’il s’agit bien d’un médecin. En introduisant une obligation généralisée de délivrer une ordonnance, la CSSS-N mettrait à contribution les assurés à hauteur de 100 à 150 millions de francs rien que pour les médicaments soumis à ordonnance, alors que les patients peuvent aujourd’hui déjà choisir de retirer leurs médicaments directement chez leur médecin ou à la pharmacie dans la plupart des cantons pratiquant la propharmacie. La proposition de la commission est donc inutile et doit être rejetée.
Encourager les médicaments à prix avantageux au lieu de les freiner (art. 57a)
En commandant de grandes quantités, les hôpitaux et les réseaux de médecins peuvent acheter les médicaments à un meilleur prix que les cabinets individuels, ce qui profite aussi bien aux patients qu’aux caisses maladie et aux cantons. La manière de gérer ces réductions doit être réglée de façon plus convaincante sur le plan juridique tout en continuant de soutenir l’approvisionnement des patients en médicaments à un meilleur prix. En interdisant totalement ces rabais, la majorité de la commission s’en prend directement aux hôpitaux et aux réseaux de médecins en les empêchant de proposer des soins à un prix avantageux. Or pour garantir des soins financièrement abordables, il serait bien plus judicieux que les fournisseurs de prestations puissent convenir avec les assureurs ou les patients de répercuter proportionnellement ces réductions et qu’ils les inscrivent de manière transparente dans leur comptabilité, comme le prévoit la proposition de la minorité I (Humbel) de la commission.
Omission d’un canal de distribution et confusion de terminologie (art. 4)
L’article cité désigne les pharmacies publiques et les pharmacies d’hôpitaux comme canaux de distribution, mais ne mentionne pas les pharmacies privées, à savoir la propharmacie (remise de médicaments par les médecins). Ce qui est d’autant plus surprenant qu’aujourd’hui déjà, les patients de 17 cantons suisses alémaniques sur 19 peuvent choisir de retirer leurs médicaments auprès de leur médecin ou à la pharmacie. Pratique sûre et avantageuse en termes de coûts, la propharmacie répond en outre à un réel besoin de la population, comme les différentes votations cantonales à ce sujet l’ont clairement montré.
Enfin, l’art. 4 emploie à tort le terme de prescription pour désigner une ordonnance. En effet, l’ordonnance désigne la décision du médecin d’employer un médicament, tandis que la prescription se réfère à la forme de mise en œuvre de cette ordonnance, p. ex. l’application, le mode d’administration ou la remise d’un médicament.